31 janvier 2010

Nestlé : Ensemble, Mieux Manger, Mieux Vivre


Des chercheurs anglais avaient découvert que le lait maternel avait des effets infiniment plus bénéfiques sur la croissance des nouveau-nés que le lait en poudre Nestlé. L'organisation non gouvernementale Owfam publia les résultats de l'enquête et en tira la conclusion suivante : inciter les femmes du monde entier-et notamment du tiers-monde- à renoncer à l'allaitement maternel au profit de l'achat des produits Nestlé constituait une atteinte à la santé, au bien-être, au développement physique et psychique des nourrissons. (...)

En 1979, 150 organisations non gouvernementales fondèrent l'IBFAN. Son but : lutter, partout dans le monde, contre la stratégie commerciale et la communication mercantile de Nestlé (...)
L'Assemblée générale annuelle de l'OMS se réunit à Genève en session extraordinaire en mai 1981. Elle vota un code internationale pour nourrissons visant à se substituer au lait maternel; Tous les États membres, à l'exception des États-Unis, votèrent en sa faveur; Fort détaillé, ce code interdit en particulier toute forme de publicité incitant les mères à substituer le lait en poudre à l'allaitement maternel. (...)

En 1984, Nestlé signa ce code international. Le mouvement international interrompit le boycott. Mais en Afrique, en Asie, en Amérique latine, si l'on en croit ses critiques, la société continua à déployer sa stratégie agressive de promotion de alimentation de substitution. (...)
L'UNICEF évalue à 4 000 le nombre de nourrissons qui meurent chaque jour du fait de l'ingestion de lait en poudre mélangé à une eau insalubre ou administré dans des biberons malpropres. S'ils étaient nourris au sein, ils survivraient.(...)
Sur d'immenses placards dressés aux carrefours des villes du Togo, du Bénin, du Burkina Faso, on voit des femmes noires, leur bébé dans les bras. "Pour le bien de ton enfant donne-lui du lait en poudre", lit-on sur l'affiche.

Peu nombreuses sont les femmes des bidonvilles qui pourront se payer toute une boite.
La poudre sera ensuite mélangée à de l'eau. Mais dans 80% des cas, il s'agira d'une eau polluée.
Certaines enquêtes conduites en Afrique et en Amérique latine ont révélé qu'à l'occasion les médecins, les infirmiers et les infirmières des hôpitaux ou des centres ambulatoires étaient travaillés au corps par les agents de certains fabricants de lait en poudre. Résultat ? Dans nombre d'hôpitaux, les bébés sont nourris au biberon dès la naissance. Dans certaines maternités africaines, la distribution des biberons est gratuite. Lorsque la mère rentre à la mason, elle reçoit, gratuiotement encore, une ou deux boîtes de lait en poudre. Puis, brusquement, la distribution s'arrête.Impossible de commencer à nourrir son bébé au sein. la mère n'a plus de lait. Paniquée, elle emprunte de l'argent, collecte quelques sous... et entre dans le cercle infernal de l'achat au marché, à ciel ouvert, de quelques cuillerées de poudre... laquelle sera diluée dans l'eau polluée du puits ou de la mare derrière l'enclos.

Jean Ziegler, L'Empire de la Honte.




20 janvier 2010

breveter le vivant


"les brevets sur le vivant ne sont pas le privilège des sociétés de l'agroalimentaire. Les seigneurs de la pharmaceutique mondiale procèdent de la même façon.
En voici une illustration. les nourrissons souffrant de difficultés respiratoires graves sont traités traditionnellement au moyen d'un gaz particulier, le Stickoxid, présent dans la nature. Un tel traitement coûte environ 100 euros et dure quatre à cinq jours. Le gaz a un effet thérapeutique rapide et satisfaisant. En Suisse, ce sont annuellmenet environ 150 nouveau-nés qui ont la vie sauve grâce à ce traitement.
Mais en 2004, c'est la société transcontinentale allemande Inotherapeutics qui fait enregistrer un brevet exclusif sur ce gaz. Il est commercialisé sous l'appellation d'Inomax. Inomax est donc désormais un médicament protégé par un brevet européen. aucun pédiatre n'a plus le droit d'administrer le gaz naturel. Dans les cliniques pédiatriques de Suisse, les traitements des nourrissons souffrant de difficultés respiratoires coûtent désormais en moyenne 20 000 euros."
Jean Ziegler. L'Empire de la Honte.

Nestlé au Brésil

" Regardons le Brésil : Neslé y réalise des profits faramineux. Une partie de ces marges est réinvestie dans les vingt-cinq usines et sociétés locales implantées dans le pays. Une autre sert au financement de l'expansion et à la conquête d'un marché local nouveau, celui de la nourriture pour animaux domestiques, par exemple (Lula n'a pas le contrôle du choix des classes riches en matière d'aide alimentaire : les habitants de favelas ou les caniches ?). mais le plus grande partie de l'argent gagné retourne à Vevey, en suisse, quartier générale de Nestlé.
Cette hémorragie est financée par la banque du Brésil. Car Nestlé ne retransfère évidemment pas des réales, monnaie sans valeur d'échange consistante, mais des dollars (ou d'autres devises dites "dures"). Ce sont donc les réserves en devises de la banque centrale du pays d'accueil qui sont sollicitées pour permettre le transfert des profits et autres produits de cession des brevets réalisés en monnaie locale ou en devises dures. Celles-ci traversant immédiatement l'atlantique, aggravant d'autant la gestion de la dette extérieure du pays d'accueil. "

Lula a proposé de faire un audit sur la dette publique du pays, le résultat entre autres d'emprunts douteux ou non destinés au bien du peuple brésilien, souscrits par les dictateurs et présidents ultra libéraux précédents. Cet audit devait permettre de déclarer illégale, selon le droit international, une partie de ces emprunts (à taux très très élevés de plus) qui ont gonflés la dette nationale. Les créanciers (transcontinentales appuyées par les Etats-Unis, mais aussi par certains pays européens dont la France) ont menacé de jouer sur la côte de la monnaie brésilienne en bourse pour la faire chuter et poser de nouvelles difficultés au Brésil , notamment au niveau des exportations. Lula a pour l'instant abandonné cette idées, contre l'avis de la plupart de ses ministres.

Jean Ziegler, l'Empire de la Honte.

les féodalités capitalistes

"Cette et faim, faim et dette constituent un cycle meurtrier apparemment sans issue. Qui l'a initié? Qui le maintient en mouvement? Qui en tire des profits astronomiques ?
Ce sont les féodalités capitalistes.
Aujourd'hui, les affameurs, les spéculateurs et les fripons dénoncés par Jacques Roux, Marat et Saint-Just sont de retour. La main homicide du monopoleur, conjurée par Gracchus Babeuf, frappe de nouveau.
Nous assistons à le reféodalisation du monde. Et ce nouveau pouvoir féodal prend le visage des société transcontinentales privées.
Rappel : les cinq cents plus grandes sociétés capitalistes transcontinentales du monde contrôlent 52% du produit intérieur brut de la planète. 58 % d'entre elles sont originaires des États-Unis. Ensemble, elles n'emploient que 1,8 % de la main d'œuvre mondiale. ces cinq cents sociétés contrôlent des richesses supérieures aux avoirs cumulés des 133 pays les plus pauvres du monde.
Dépositaires des avoirs technologiques, électroniques, scientifiques les plus avancés, contrôlant les principaux laboratoires et centres de recherche du monde, les sociétés transcontinentales dirigent le processus de développement matériel de la condition humaine. et le bien qu'elles apportent à ceux qui peuvent s'assurer leurs produits et leurs services est indiscutable. Mais le contrôle privé qu'elles exercent sur une production et des découvertes scientifiques par nature destinées au bien commun a des conséquences désastreuses.
Car l'unique moteur de ces nouveaux féodaux est l'accumulation de gains privés le plus élevé possible dans le temps de plus réduit, l'extension continuelle de leur pouvoir et l'élimination de tout obstacle social s'opposant à leurs décrets."
Jean Ziegler , l'Empire de la Honte.